La Forêt Noire à VTT ou l'Everest sans Sherpa
Vous connaissez la Forêt Noire ? Pas le gâteau dont je viens de manger une part à la rhubarbe au moment où j'écris ces lignes mais bien le pendant allemand de nos Vosges.
La seule fois où j'y ai mis les pieds, c'était
en 95 et ca m'avait mis l'eau à la bouche.
Tout comme les Vosges, le profil de la forêt Noire est propice au ski
de fond et est "VTT friendly" comme disait Churchill.
Cette année, l'objectif est le X-bike Crossing sud-nord.
1ère étape :
Arrivée en voiture à Bad Säckingen et les cale-pieds s'enclenchent à
midi. Alors qu'en France, c'est tout couvert, il règne un soleil de
plomb. Premières impressions, le balisage est béton, les chemins sont
larges et bons et c'est méchamment vallonné.
Ils sont gentils, avant les grosses bavantes, il y a un panneau qui te
lamine bien le moral genre "vous allez monter de 700 m en 7 km".
Un chemin de croix ? L'avenir le dira...
Et ca monte à n'en plus finir, à un moment, je m'arrête à un
croisement, retire mon casque et une flaque de sueur tombe à mes pieds.
Ben qu'est-ce qu'il m'arrive ?
Eureka, j'ai compris, il fait lourd au possible et l'orage guète. Il ne
va pas guetter très longtemps et je prends une bonne salve de grêle.
Avec la couverture de sapins, je m'en tire bien mais le sol se gorge
d'eau et je me fais rapidement repeindre couleur terre.
Arrivée à Todmoos.
Recherche d'un hébergement pour tomber finalement chez une gentille
mémé qui ne parle qu'allemand, gloups ! Après une bonne douche et le
rituel des étirements, visite du village et repas de sportif : salade
composée énorme, pâtes, le tout arrosé d'une bière. Demain, grosse
étape, donc dodo tôt.
2ème étape :
La question qui m'a turlupiné toute la journée : pourquoi parle-t-on de
montagnes russes alors que beaucoup moins loin, on a celles de la Forêt
Noire ?
L'objectif du jour était le Feldberg, point culminant du massif.
Dur dur pour faire simple. Surtout que presque arrivé au sommet, j'ai
dû porte le vélo dans les bruyères pour éviter un grand tétras campé en
plein milieu du chemin et qui attaquait quiconque s'approchait de lui.
Arrivée à 17h mais dans un état déplorable.
Les points notables : pas de pluie, neige encore présente et obligé de
passer à pied sur quelques centaines de mètres, encouragement (en
allemand donc j'ai rien compris) à la fin des grosses bavantes en fin
de journée.
A Breitnau, je rencontre une famille alsacienne au complet (20
personnes) qui me conseille un hébergement d'enfer. Je les retrouve le
soir au restaurant pour l'apéro. Deux bières plus tard, on passe à
table : soupe, cerf avec spätzle et salade au buffet.
3ème étape :
C'est la besace remplie avec un lièvre, une cigogne et deux écureuils
que j'arrive à mon hôtel. Le paysage a beaucoup changé aujourd'hui : on
trouve des champs de colza, de houblon et quand même des sapins.
Champ avec au loin le Feldberg, objectif de la veille :
Les villages traversés sont pour la plupart sur de grands axes routiers
et n'ont pas le cachet de ceux des précédents jours. Je pensais
m'arrêter à Hornberg mais malgré un château dominant la ville, ca sent
le gros bourg (ce n'est pas une contrepètrie) et je décide de continuer
malgré les nuages qui menacent. L'averse ne me laisse pas le temps
d'arriver au prochain village sur l'itinéraire, je dois m'arrêter dans
un hôtel miraculeusement là.
Grrrrr, moi qui avais pris goût aux chambres douillettes chez
l'habitant, je trouve la mienne bien fade et bien entendu, elle est
presque deux fois plus chère. Truite aux amandes pour me consoler na !
4ème étape :
Et dire que j'ai fait allemand première langue ! C'est pourtant pas
compliqué de demander un peu d'eau pour remplir sa gourde. Mais le
petit couple de pépé-mémé n'a rien compris à mon allemand scolaire :
résultat, ils ont rempli ma gourde avec de l'eau pétillante. Ha ils ne
le savent pas mais ils m'ont sauvé la vie. Je commençais à en avoir
plein les bottes et là j'ai avalé les dernières bavantes sans coup
férir. Arrêt à Klosterreichenbach dans un mignon petit hôtel.
Que je vous raconte : en amuse-gueule, friand au camembert, puis soupe
goulasch à la Hongroise. C'est une soupe servie dans un pain rond
évidé. Bien entendu, j'ai aussi mangé la garniture, est-ce correct ?
Puis buffet de crudités (toujours inclus dans le dîner au restaurant,
pas besoin de le demander) et enfin pâtes à la Napolitaine.
Je me retrouve avec une assiette gigantesque avec au bas mot 200 à 300g
de pâtes, des champignons, des haricots verts et une bonne sauce à
l'ail. Très bon mais j'ai failli pas finir. Que du bon dans cet hôtel,
même qu'y avait pas d'eau froide dans la douche, heureusement que je
connaissais la combine pour pas se faire ébouillanter.
Et l'étape me direz-vous ? Encore un morceau de bravoure pour les
cuisses.
Il avait plu une averse vers 6h du mat', le sol était bien humide mais
le vent s'est levé en journée et le soleil a duré jusqu'au soir. La
composition du sol a changé : du grés rose rendant les flaques couleur
rouille et du granite gris donnant des chemins (un peu) plus cabossés.
Heureusement que le topo et la balisage sont sans reproche car il y a
des chemins partout et ils sont tous exploités : chemin de rando, de
marche nordique (très populaire ici), de VTT ou de ski nordique.
Abri de bûcherons :
Pour les amateurs de ski de fond, le domaine est tentant. Autour du
Feldberg, je pense qu'il y a de grandes côtes alors que le domaine de
Baiersbronn traversée aujourd'hui me semble ressembler plus à un
plateau. A confirmer cependant avec le plan des pistes.
Au niveau mécanique, un VTT tout suspendu est du luxe pour ce genre de
traversée : un semi-rigide ou même un rigide feront l'affaire. De même,
des pneus assez roulants sont suffisants. Le nombre de passages
techniques est quasi-nul; d'après le topo, on passe une fois sur un
chemin très technique, il y a juste quelques cailloux et des rigoles
d'évacuation d'eau.
Au niveau technicité, je mets le niveau le plus faible par contre je
mets le niveau physique le plus grand. A ne pas sous-estimer.
A titre d'exemple, autour du Feldberg, en 77 km, on fait 3000 D+ et
4400 D-. C'est difficile de concevoir les étapes à cause des dénivelés
: soit on reste dans des dénivelés raisonnables et on fait peu de
kilomètres soit on fait de la distance mais il faut que les cuisses
suivent.
Les descentes sont très rapides et roulantes mais on ne peut pas
franchement se lâcher car ca tourne, il peut y avoir des camions de
débardage en face; en plus le sol est soit humide soit recouvert de
gravillons. Ce soir, mes deux paires de plaquettes sont usées, j'ai
jamais usé aussi vite mes freins.
Un des seuls chemins en balcons, profitons-en :
Sur ces considérations, je recommande deux types de parcours :
- en tandem : vu que c'est peu technique, je me dis que quitte à pester
pendant 1 heure qu'on ne voit pas le bout des côtes, à deux ca passe
peut-être mieux.
- avec remorque (ca passe hormis quelques passages) ou sacoche avec
duvet et de quoi manger. Il y a des abris un peu partout dont certains
ont l'eau courante et de quoi faire un feu à l'extérieur.
Et enfin, pas une seule tique recensée : soit cela n'a rien à voir avec
les Vosges, soit l'hiver rigoureux qui a sévit en Forêt Noire les a
toutes calmées.
5ème étape :
Après un petit déj' copieux, me voici à 8h à tergiverser dans la
chambre; il reste 110km à faire jusqu'à Pforzheim et je compte
m'arrêter dans un hôtel un peu avant histoire d'être présentable le
lendemain à Pforzheim pour prendre le train. Mais voilà : il pleut !
Jusqu'ici, c'était orage le soir et beau la journée. Là et l'aubergiste
me le confirme, il va pleuvoir toute la journée. J'hésite entre une
journée de repos mais il n'y a pas grand chose à faire dans la ville
sous la pluie ou la résignation à partir en jouant sur la chance. A
8h30, la pluie s'arrête et j'en profite pour partir. Les chemins sont
trempés mais pas boueux donc à part les projections d'eau partout,
j'avance à bonne allure. Dès 800-900 m d'altitude, je rentre dans la
couverture nuageuse, l'humidité se condense partout mais surtout sur
moi.
Un des nombreux abris :
Vers 13h, ca tonne de partout et le début de l'orage coïncide avec la
rencontre d'un abri !
La pluie passée, je continue mais un deuxième service s'annonce et je
me fais bien rincer. Vers 16h, je décide de rechercher un hébergement
car il reste peu de kilomètres jusqu'à Pforzheim. Mais gros hic, ce
sont des villages pavillonnaires donc aucun hôtel, le seul que me
recommande un couple de promeneurs semble fermé depuis quelques années.
C'est donc à 18h que j'arrive à la gare de Pforzheim, je m'arrête dans
un hôtel commun, je prendrai le train demain matin.
La recherche d'un resto a duré un bon bout de temps vu que je voulais
manger une pizza et que je n'ai jamais trouvé une seule. Je décide de
m'acheter de quoi manger dans la chambre. Même pas une bière pour fêter
la fin du raid ? Peut-être que j'ai vu suffisamment de liquide
aujourd'hui !
Conclusion :
Clairement la partie sud de la forêt noire est la plus jolie au niveau
des paysages et des villages. C'est là que vous trouverez le plus grand
choix d'hébergements. Il est inutile de les réserver à l'avance en mai;
pour les autres dates, il faut regarder les périodes de vacances
allemandes. Attention : très peu d'hébergements avant Pforzheim.
Les paysages sont somme toute assez monotones, bien loin de ce qu'on
peut trouver sur la GTMC ou même le tour du Lot. Cependant, le moins
bon de mes repas en Forêt Noire était meilleur que le meilleur de mes
repas sur la GTMC et pour bien moins cher. La fierté française va en
prendre un coup.
Un train fait le parcours Pforzheim - Bad Säckingen en 2h30.
Inutile de prendre un drap sac ni de serviette, un savon est nécessaire.
A posteriori, je me dis que le sens nord - sud permet de finir par la
partie la plus jolie mais aussi la plus dure physiquement. Le parc
naturel de la Forêt Noire édite 3 cartes VTT de massif permettant de
tourner (monter ?) plus longtemps dans le secteur.
Pour toutes questions, contactez-moi via le KiFaiKoi.
Itinéraire parcouru du 8 au 13 mai 2009.